Nous avons souhaité interroger deux professionnels expert-comptable sur le sujet de l'après-covid pour l'activité de nos pharmaciens.
Voici leurs témoignages respectifs, qui nous éclairent sur la situation comptable des pharmacies après cette phase COVID, bien particulière.
Témoignage de Nicolas TRIKIAN, Expert-Comptable, C2C PHARMA / WIZZIOU PHARMA
Cette année 2020 a été frappée par une crise sanitaire qui a considérablement modifié notre vie quotidienne : un monde paralysé et des commerces fermés.
Contre tout attente, le chiffre d’affaires de nos clients pharmaciens région sud-est (ventes de marchandises, honoraires de dispensation, honoraires à l’ordonnance, prestations du génériqueur) a légèrement progressé.
La première période de confinement a généré de fortes disparités selon l’emplacement ou la typologie de l’officine. Les pharmacies de gros bourg et de zone rurale ont été clairement moins impactées que les pharmacies de centre-ville et de centre commercial. D’une manière générale, nous avons constaté que la population a renforcé sa confiance vis-à-vis des pharmacies de proximité et de quartier durant cette période.
Sur l’année 2020, les ventes de masques et de gel hydroalcoolique ont boosté une partie du C.A. de produits conseils de la pharmacie. Le métier de pharmacien a évolué et de nouvelles missions ont pu être mises en place en fin d’année 2020 avec notamment les prestations pour test de dépistage du COVID-19.
L’E.B.E., indicateur de gestion le plus important et le plus significatif pour mesurer la rentabilité nette d’une officine, a légèrement progressé sur cette année 2020.
Quant au marché de la transaction, la crise sanitaire n’a pas eu d’impact sur le marché de l’officine.
Au sein de notre groupement CGP, nous constatons un nombre de cessions équivalent à l’an dernier, ce qui confirme l’engouement des jeunes diplômés à acquérir une officine.
De plus, la multiplication des modes de financement au travers de prêts dits “boosters” permettent à de nouveaux acquéreurs, qui auparavant n’avaient pas la capacité financière, de se positionner sur le marché souvent au détriment des associés investisseurs.
Témoignage de Nicolas BALDO, Expert-Comptable, Associé KPMG Marseille
Bouleversé par une pandémie sans précédent, notre monde a vécu une année 2020 particulièrement singulière : l’économie a été profondément impactée et les entreprises n’ont pas réagi de la même manière à ce cataclysme.
S’agissant des officines, la plupart a fait preuve de résilience et a démontré son utilité essentielle.
La Covid-19 a positionné la pharmacie comme «l’église au milieu du village», c’est-à-dire un acteur incontournable de notre système de santé, capable de pallier aux pénuries médicales de certains bourgs et villages tout en maintenant une relation humaine mise à rude épreuve cette dernière année.
L’arrivée des télécabines permettant de consulter un médecin, les tests Covid et maintenant la vaccination soulignent l’importance voire même la nécessité de trouver une officine proche de son domicile.
Durant le premier confinement, l’officine française a permis de conserver un lien social parfois vital pour certains de nos concitoyens. Pour l’ensemble de ces raisons, les premiers bilans sortis par nos soins sont globalement satisfaisants. Nous notons même pour certaines des hausses de chiffres d’affaires et des trésoreries convenables avec ou sans utilisation du prêt garanti par l’État.
Seule ombre au tableau : les officines de grandes surfaces ont été victimes de la baisse de la fréquentation au gré des diverses mesures de fermetures adoptées par les autorités. Si elles ont subi une baisse de chiffre d’affaires, elles conservent néanmoins un équilibre financier grâce aux diverses aides gouvernementales.
Enfin, les transmissions se portent bien avec un nouvel engouement de la part des jeunes diplômés à devenir titulaire.
Les différents boosters d’apports, la bonne santé financière des titulaires installés durant cette dernière décennie et le positionnement de la pharmacie dans l’écosystème de santé sont autant d’atouts qui séduisent les futurs acquéreurs.
La pharmacie a plus que jamais le vent en poupe et a sans aucun doute de beaux jours devant elle !